Dans ma vie, que d’évènements, de travail intérieur, de germinations impalpables.
En ce temps qui s’ouvre et donne de la couleur au moindre espace, je voudrais ralentir le rythme, reprendre mon souffle, me mettre à l’école des lentes croissances et me souvenir :
le sillon n’est jamais droit, il est traversé, heurté, renouvelé, pourquoi t’étonner du moissonneur ? la moisson n’est pas sans incertitude, elle est seulement celle de la promesse, ne te laisse pas surprendre, la saison attendue ne vient pas toujours, obéissante, à l’heure fixée, pourquoi tout calculer ?
Voilà ma confiance pour ces heures qui viennent au-devant de moi, un Autre est là avec son geste large qui permet que poussent ensemble épis et ronces, branches folâtres et gerbes prometteuses. Les sillons sont brouillés, place à une autre sagesse, mon Maître et Seigneur vient prendre sa place chez moi et guide ma main d’apprenti.
« On ne passe qu’une fois sur le chemin de la vie… »
Ferme les yeux, ouvre ton cœur, retiens ton souffle, prends ton élan, trace bien ton sillon.
Ils sont tous là à t’attendre, le petit tellement caché et oublié, la multitude aux milliers de visages, le jeune qui se cherche avec fureur, l’adulte qui tarde à percevoir le nouveau sillon.
Le Maître est là, il reste le moissonneur mais il te veut pour creuser son sillon à lui aux limites du monde et pour semer à sa suite avec des germes d’éternité.
Béatrice Joly, communauté d'Abidjan